Ça cache quoi,
une ombre ?
Marc Villemain
Marc Villemain
Sous ses airs un peu désinvoltes,
le nouveau recueil de Pierre Charras se déguste aussi vite que son charme
sensible distille ses effluves. Au départ un peu expectatif, voire chagriné que
l’écriture, à force de concision, ne se mette pas davantage en danger, j’ai
fini par m’apercevoir que j’avais bu ces huit textes comme du petit lait, et
que leur doux clapot avait réussi à m’éloigner des embruns du monde. On
pourrait d’abord se croire dans tel ou tel de ces petits fragments intimistes à
la mode, où le lecteur étouffe à force de recroquevillement lacrymal. Mais non,
il n’en est rien : Charras sait écorcher en profondeur tout en rendant les
choses aériennes.
Toutes les nouvelles ne sont pas d’égale valeur mais, de l’une à l’autre, l’ensemble installe un climat qui fige le petit rictus amusé du départ en une grimace lestée de mélancolie désoeuvrée. Jusqu’à ce dernier texte, Le Vent mauvais (allusion au discours du maréchal Pétain, le 12 août 1941 : « Je sens se lever depuis quelques semaines un vent mauvais »), dont on aura toutefois le droit de s’agacer du propos un tantinet édifiant. Mais le texte est sauvé par un sens de la dramaturgie, une naïveté de ton et un sentiment de délitement du monde qui sont autant de marques du travail littéraire de Pierre Charras.
On le préfèrera toutefois lorsqu’il assume cette forme de naïveté poétique qui, au fil des livres, identifie ou qualifie son œuvre. ainsi dans la nouvelle intitulée à une passante, où un photographe découvre, en travaillant dans sa chambre noire, qu’une des jeunes filles du groupe dont il a réalisé un cliché était nue. Ou encore dans Pas d’école, peut-être la plus touchante de ces huit nouvelles : des parents, démolis par une vie qui n’offre aucun espoir, décident d’abandonner leur enfant dans les jouets d’un grande centre commercial. La simplicité et la sensibilité du récit lui donnent son évidence, son naturel, avant de se résoudre en une ellipse très bienvenue, et d’une manière qui ne fut pas sans me rappeler ce grand film de Michael Haneke qu’est Le septième continent. C’est ainsi que les quelques ombres qui traversent le recueil de Pierre Charras nous suivent plus longtemps que ce à quoi nous nous attendions.
Toutes les nouvelles ne sont pas d’égale valeur mais, de l’une à l’autre, l’ensemble installe un climat qui fige le petit rictus amusé du départ en une grimace lestée de mélancolie désoeuvrée. Jusqu’à ce dernier texte, Le Vent mauvais (allusion au discours du maréchal Pétain, le 12 août 1941 : « Je sens se lever depuis quelques semaines un vent mauvais »), dont on aura toutefois le droit de s’agacer du propos un tantinet édifiant. Mais le texte est sauvé par un sens de la dramaturgie, une naïveté de ton et un sentiment de délitement du monde qui sont autant de marques du travail littéraire de Pierre Charras.
On le préfèrera toutefois lorsqu’il assume cette forme de naïveté poétique qui, au fil des livres, identifie ou qualifie son œuvre. ainsi dans la nouvelle intitulée à une passante, où un photographe découvre, en travaillant dans sa chambre noire, qu’une des jeunes filles du groupe dont il a réalisé un cliché était nue. Ou encore dans Pas d’école, peut-être la plus touchante de ces huit nouvelles : des parents, démolis par une vie qui n’offre aucun espoir, décident d’abandonner leur enfant dans les jouets d’un grande centre commercial. La simplicité et la sensibilité du récit lui donnent son évidence, son naturel, avant de se résoudre en une ellipse très bienvenue, et d’une manière qui ne fut pas sans me rappeler ce grand film de Michael Haneke qu’est Le septième continent. C’est ainsi que les quelques ombres qui traversent le recueil de Pierre Charras nous suivent plus longtemps que ce à quoi nous nous attendions.
Éditions Le Dilettante |
Article paru dans Le Magazine des Livres
N°7, novembre-décembre 2007
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire