Marc Villemain
Il faut savoir gré à
Stéphane Bonnefoi d’avoir excellemment réuni, édité et préfacé ces quelques
portraits et réflexions d’un écrivain qui, fort éloigné du sérail, n’en eut pas
moins Jean Paulhan pour mentor et Gaston Gallimard pour coach. Entré en
littérature par effraction et à rebours des lois et pratiques du milieu, il lui
aura suffi d’écrire pour inspirer respect et amitié à nombre d’écrivains de son
temps. Étranger à toute idée de coterie, projetant sur l’existence une candeur
et une ironie dont aucune mélancolie ne viendra à bout, loyal par culture,
solidaire par destin, travailleur par nécessité, curieux par tempérament, Marc
Bernard était entièrement tourné vers la réalisation de la liberté.
D’origine laborieuse, il écume les petits boulots et subsiste comme il peut après la mort de son père (assassiné aux États-Unis) et de sa mère (écrasé sous son labeur de lavandière.) Esprit finalement assez inclassable, les carcans sociaux n’avaient guère de sens pour lui – et on lira avec plaisir cette savoureuse découverte du bourgeois, suite à un premier rendez-vous avec Jean Paulhan : « Quand je sortis de là, ma conception du bourgeois branlait un peu du manche. Point de cigare à bague et de bedons. Et l’on paraissait s’intéresser sérieusement aux divagations de tout un chacun. » Moyennant quoi, et à l’instar son ami Eugène Dabit, Marc Bernard ne se sentait « jamais tout à fait à l’aise sur le terrain de ce qu’on appelle la culture. » D’autant que rien, dans sa trajectoire ou son existence, ne le destinait à écrire. C’est ce qui rend plus frappantes, et plus belles encore, les quelques rencontres qui nous sont ici rapportées, de la plume la plus directe et la plus élégante qui soit. Marc Bernard n’est pas de ces écrivains qui finassent, il n’est pas de ceux qui donnent à leur plume l’ambition et l’objectif d’une œuvre : il écrit parce qu’il en eut un jour la révélation, et parce qu’écrire revient à emprunter un chemin de liberté. On a oublié qu’il obtînt le prix Goncourt pour Pareils à des enfants – mais il est vrai que nous étions en 1942, qui n’est certainement la meilleure période pour digérer les honneurs. Aussi ces textes courts, pleins de justesse, de générosité, d’observations savoureuses et de fausse légèreté, permettent-ils de redécouvrir celui qui, dans une lettre à Paulhan, expliquaient que ses « maîtres à penser sont le soleil et la mer. » De quoi rendre nostalgique
Ps / Il importe de signaler aussi la publication, aux mêmes éditions FINITUDE, d’un petit livre de Christian Estèbe, Petit exercice d'admiration. L’auteur y raconte ce qu'il doit à Marc Bernard, et notamment à son livre La Mort de la bien-aimée.
D’origine laborieuse, il écume les petits boulots et subsiste comme il peut après la mort de son père (assassiné aux États-Unis) et de sa mère (écrasé sous son labeur de lavandière.) Esprit finalement assez inclassable, les carcans sociaux n’avaient guère de sens pour lui – et on lira avec plaisir cette savoureuse découverte du bourgeois, suite à un premier rendez-vous avec Jean Paulhan : « Quand je sortis de là, ma conception du bourgeois branlait un peu du manche. Point de cigare à bague et de bedons. Et l’on paraissait s’intéresser sérieusement aux divagations de tout un chacun. » Moyennant quoi, et à l’instar son ami Eugène Dabit, Marc Bernard ne se sentait « jamais tout à fait à l’aise sur le terrain de ce qu’on appelle la culture. » D’autant que rien, dans sa trajectoire ou son existence, ne le destinait à écrire. C’est ce qui rend plus frappantes, et plus belles encore, les quelques rencontres qui nous sont ici rapportées, de la plume la plus directe et la plus élégante qui soit. Marc Bernard n’est pas de ces écrivains qui finassent, il n’est pas de ceux qui donnent à leur plume l’ambition et l’objectif d’une œuvre : il écrit parce qu’il en eut un jour la révélation, et parce qu’écrire revient à emprunter un chemin de liberté. On a oublié qu’il obtînt le prix Goncourt pour Pareils à des enfants – mais il est vrai que nous étions en 1942, qui n’est certainement la meilleure période pour digérer les honneurs. Aussi ces textes courts, pleins de justesse, de générosité, d’observations savoureuses et de fausse légèreté, permettent-ils de redécouvrir celui qui, dans une lettre à Paulhan, expliquaient que ses « maîtres à penser sont le soleil et la mer. » De quoi rendre nostalgique
Ps / Il importe de signaler aussi la publication, aux mêmes éditions FINITUDE, d’un petit livre de Christian Estèbe, Petit exercice d'admiration. L’auteur y raconte ce qu'il doit à Marc Bernard, et notamment à son livre La Mort de la bien-aimée.
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